Véritable ode à l’amour de soi, invitation à se (re)connecter à la nature et même grande passerelle entre les classes sociales, c’est quoi réellement, le naturisme?
C’est une philosophe de vie, bien plus poétique que ce que l’on croit. Le naturisme ne se réduit pas à bronzer nu à la plage. Il y a quelques jours, un tweet a attiré mon attention. Il mentionnait le retour, à l’approche de l’été, des reportages télévisés douteux et plutôt moqueurs sur le sujet, amputant le naturisme de sa réelle définition. Éric, de la Fédération Française de Naturisme (FFN), a répondu à toutes mes questions. « C’est vrai que l’image du grand public c’est plutôt Mon curé chez les nudistes, et c’est vraiment réducteur parce que le naturisme c’est tout autre chose. C’est une véritable philosophie de vie qui prend racine dans une histoire assez vaste.»
(Re)connexion avec la nature
Le naturisme pourrait se définir par « une manière de vivre en harmonie avec la nature caractérisée par la pratique de la nudité en commun« . La présence de l’environnement extérieur est très importante. On souligne d’ailleurs la présence de la racine « nature » dans le terme, contrairement au nudisme qui lui est composé de « nu ». Éric nous explique que le naturisme est né de plusieurs branches. « Il y a notamment la branche médical où l’on voulait reconnecter l’Homme à la nature pour le soigner. » Un peu d’histoire… « L’adjectif ‘naturiste’ apparaît dans le vocabulaire médical à la fin du XVIIIe siècle. Il qualifie alors l’attitude de médecins qui, par scepticisme vis-à-vis de la pharmacopée classique, choisissent de s’en remettre à la disposition naturelle des organismes vivants à lutter pour retrouver la santé. » Vivre sans vêtements, c’est donc une volonté de reconnecter le corps à un environnement naturel que l’on a aussi envie de préserver. Être naturiste, c’est également être écolo.
« Un courant anarchiste »
« Il y a clairement un mouvement du naturisme qui veut lutter contre les barrières sociales, gommer les signes extérieurs de richesse », poursuit Eric. « Il est question de faciliter l’échange. Quand on est nu en face de quelqu’un on ne sait pas s’il est cadre, fonctionnaire, ouvrier ou caissier. On arrive a en percevoir des détails avec le temps, mais ça reste très minime, surtout pour les premiers échanges. » En effet, une fois dévêtu les réflexes et les reflets sociaux sont tout autres. Il y a un côté très égalitaire dans le naturisme. C’est ce que veut promouvoir la FFN. « Nous sommes un mouvement mixte, familial, laïc et écolo. On s’inscrit dans la réalité d’un pays démocratique et dans l’ère du temps. Peut-être même plus encore que l’ère du temps.»
Mon corps, que je t’aime
Le naturisme c’est aussi, et surtout, du respect et de la bienveillance. Ce sont ces valeurs que la fédération veut mettre en avant. « Il n’y a aucun jugement physique. Nous ce que l’on veut, c’est lutter contre la honte du corps, et nous travaillons sur un projet à ce sujet (cf photo, Spoiler Alert). L’idée de cette campagne, c’est de dire que l’on accepte tout le monde et que l’on doit s’accepter comme on est. La société nous impose des standards totalement inatteignables. » Thérapie personnelle mais aussi véritable libération sociétale, le naturisme s’attarde sur le bien-être de chacun. Et s’il n’y a qu’un seul mot que je devais retenir de ma discussion avec Éric, ce serait « respect ».
Stop aux tabous
Quand on aborde la situation actuelle du naturisme, sa réaction rime avec incompréhension. « La France est pionnière du naturisme mais les choses étaient plus simples dans les années 80. Aujourd’hui, les jeunes générations sont, globalement, très mal à l’aise avec la nudité. Du fait des réseaux sociaux notamment, elles ont peur du harcèlement, et de la publication du corps. Même dans les clubs de sport les jeunes ne prennent plus de douche parce qu’elles sont en commun. Alors, moi, j’aimerais qu’on arrête de rendre le corps tabou et surtout qu’on arrête de faire un raccourci direct entre nudité et sexualité.«
La FFN prépare d’ailleurs une campagne autour du respect, de l’acceptation et de l’inclusion de chacun par la nudité. Ils ont travaillé avec un panel de personnes très divers. Grandes ou petites, maigres ou grosses, hommes et femmes, avec ou sans poil… Pourtant, impossible de diffuser ces clichés sur Facebook. « Nous nous élevons aussi contre cela, de dire que la nudité est forcément sexuelle pour Facebook. Ce réseau impose son ordre moral au monde de par sa position dominante. » Alors, c’est quoi le futur idéal ? « Nous ce qu’on aimerait, c’est une situation à l’allemande, où il y a une acceptation générale et où les naturistes et les non-naturistes pourraient vivre ensemble sans souci. » Maintenant qu’on est des pros du naturisme, plus de raccourci ni de confusion entre les termes. Le mot de la fin revient à Éric : « J’espère, après cette discussion, vous avoir donné envie d’essayer avec nous ! »
Aurélie Rodrigo
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