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  • Photo du rédacteurAurelie Rodrigo

Victoria Scampa, de la pensée au concret

Penseuse et amoureuse du vrai, devenue politique engagée pour conjuguer le contradictoire. Cette professeure de philosophie « fondamentalement de gauche », révélée sur la liste Archipel Citoyen, fait le pont entre politique et philosophie.


Starbucks ou BioFoodies Café? Pour notre entrevue ce sera BioFoodies Café. Le choix paraissait presque évident. Elle incarne « la prof de philo gaucho », comme elle suppose que ses élèves l’imaginent. Femme de lettres et de pensées depuis toujours, désormais politique engagée. A 29 ans, elle conjugue aujourd’hui ce qu’elle trouvait contradictoire hier.


"Plus jeune, après ma terminale, on m'a dit de faire ce que je voulais mais de toujours emprunter la voie royale. Ce que je voulais, c'était philosopher." Elle s'arrête un instant pour réfléchir avec elle même. "Je voulais interroger le vrai, je voulais transmettre." Alors, c'est ce qu'elle a fait. Aujourd'hui professeure de philosophie au lycée Raymond Naves, à Toulouse, elle a trouvé sa vocation professionnelle, mais également une nouvelle vision de la politique. "J'ai toujours été profondément socialiste, mais pas engagée."


C'est la confrontation avec le monde du travail qui a changé sa conception de la politique. "Un jour je faisais des photocopies pour ma classe au lycée, un collègue attendait son Tou à la photocopieuse, évidement je méritais des fessées pour l’avoir fait patienter, mots pour mots". Lance-t-elle avec une sourire ironique, sans donner davantage de détails. Micro-agressions sexistes, situations concrètes et désaccords avec le système d'éducation français, l’ont menées à "beaucoup d'interrogations". "Pourtant à cet instant j'avais encore un problème entre la figure de militante politique opposée à celle de professeure de philosophie". Elle marque une pause de réflexion. "Pourtant ce qui me manquait dans la philo, le concret, le réel, je l'ai trouvé dans la politique, j'applique mes introspections".


Premiers pas


"Certaines choses lui tenaient déjà à cœur, mais tout avait l'air assez nouveau pour elle". En janvier 2018 la philosophe a sauté le pas. Elle a rejoint le groupe de soutien à Jean-Luc Mélenchon du quartier Saint-Cyprien, animé par Aymeric Chouquet. Un homme qu'elle qualifie comme celui qui lui a "mis le pied à l'étrier".


Au-delà de "l'évidence du mouvement" c'est aussi la figure politique qui l’a séduite. Elle marque une nouvelle pause de réflexion. "Il y a la France Insoumise, les idées et les ambitions, mais aussi le personnage de Jean-Luc Mélenchon. En dehors de l'homme politique, c'est un homme de lettres, un ancien enseignant qui a suivi des études de philosophie", illustre la jeune femme. Pour elle, la gauche n'est pas seulement une orientation politique, c'est aussi et surtout un collectif. Le dos rond, les épaules vers l'avant, les mains jointes, comme pour témoigner d'une ardeur qui l'anime encore. "Je me souviens d'un meeting de François Ruffin où régnait une chaleur et une proximité remarquable".


"Au début je participais à une ou deux réunions par semaine, puis après j'allais tracter le dimanche et le mercredi après-midi aussi..." Très rapidement la politique a occupée une grande place dans la vie de la novice. "Elle a tout de suite été très impliquée, notamment avec les réformes de l'enseignement ou la question féministe". Aymeric Chouquet revient sur les débuts de l'enseignante, alors qu'elle venait tout juste de s'engager dans un groupe thématique féministe de la FI. Aujourd'hui elle en est l'animatrice, par "convictions personnelles et intellectuelles" déclare-t-elle. Pourtant, l'insoumise n'a pas rompu avec ses interrogations.


L’île FI avant tout


Elle prend une grande inspiration et pose sa tasse de thé. "Quelle place je donne à la politique dans mon travail à cet instant? Dire que je suis neutre en classe ne serait pas vain?" Les yeux au ciel, elle circonstance. "Par exemple je me demandais, comment réagiraient les élèves si je venais en classe sans être épilée". Elle souligne la barrière entre sa personne et son rôle d'enseignante. "J'essaye de la déconstruire de plus en plus. Finalement je m'applique à interroger mes valeurs avec les classes de terminales, tous ces sujets leur parlent, ils sont d'actualité, ils sont brûlants." Pour l'histoire elle conclue, "je ne m'épile finalement plus, et rien n'a changé".


Féministe, professeure, insoumise et syndiquée, désormais archipelienne. Victoria Scampa compte de nombreuses lignes sur son CV politique, mais reste fidèle au parti de Jean-Luc Mélenchon avant tout. "J'ai rejoint Archipel Citoyen en suivant la France Insoumise". Trois phases de sélection du collectif plus tard, elle occupe la 42e position de la liste. Une place qui lui laisse un goût amer. “Je me suis beaucoup impliquée personnellement, j'ai donné du temps, évidement j'aurais aimé être éligible". Aymeric Chouquet avait donné sa pensée à ce sujet. “La seule chose qui lui manque maintenant est de faire sa place, de savoir s’affirmer dans le groupe”.


L’enseignante affiche un air de déception et pointe certains autres problèmes. "Pour la FI aussi les négociations sont difficiles à l'intérieur d'Archipel." La professeure affiche un sourire et s'arrête sur un "voilà c'est tout", elle n'en dira pas davantage. "Mais cette liste novatrice a un désir admirable de perfection, une valeur que je partage avec eux. Avant je cherchais l'idéalisme dans les livres, aujourd'hui dans la politique j'ai trouvé un vrai objectif de société meilleure." En citant Simone Weil, Victoria Scampa pose les limites. Elle dit trouver en politique, une place de débat, mais ne pas se laisser influencer de trop par le collectif.


Aurélie Rodrigo

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